Efficiency that makes sense
Bon, je sais, « faire sens » ce n’est pas français, et c’est un bon dérivé de l’anglais « make sense ». Pour autant, l’analyse de la langue donne toutes les possibilités à cette très mauvaise traduction :
Tomber sous le sens, aller dans le bon sens, être de bon sens, pointer dans la bonne direction, créer de la signification… L’épaisseur de la langue française nous apporte beaucoup.
Pour autant que cette traduction soit incorrecte, nous avons décidé de la garder à partir d’un constat :
Je ne suis heureux dans mon travail que si je réalise des activités au travers desquelles je me réalise. Si je suis compétent pour faire quelque chose, et que j’y trouve un certain plaisir, je suis dans un flow parfait. Personnellement je ne me réalise absolument pas dans mes notes de frais ou dans le remplissage des time sheet pour nos clients. Pourtant ce sont des activités essentielles à la bonne gestion de MURANO, de notre équipe, et de nos clients.
1 – Réexpliquer, remettre en perspective.
C’est donc important de remettre du sens dans ces activités, expliquer pourquoi elles sont importantes, essentielles, et pourquoi elles favorisent le développement de certaines compétences utiles aux salariés. C’est la première brique du sens : l’exemplarité et la pédagogie. Expliquer, expliquer encore, remettre en perspective. En cela les managers de proximité sont plutôt bons dans les entreprises que nous suivons au quotidien. Souvent experts techniques ou fonctionnels, ce sont des hommes et femmes de terrain. Pourtant la mécanique se grippe lorsque le contexte est mouvant, que le télétravail se répand et que l’absence de visibilité crispe les énergies.
Je vous conseille donc de consacrer du temps à vos équipes pour réexpliquer et faire la pédagogie du process. Ce n’est jamais inutile, vous risqueriez même de trouver de belles idées d’améliorations avec vos équipes.
2 – Mesurer
Expliquer ne suffit pas. Nous prônons la mesure du temps passé par les équipes sur leurs différentes tâches. Passer 4 heures par jour en réunion, ou remplir un reporting boring deux fois par semaine, a certainement un impact sur le sens selon mon profil, mes compétences, et mes aspirations. Et cela est tout à fait personnel. Le pas de côté consiste non pas à ce que l’entreprise, dans sa culture, son ADN, sa technostructure, décrète ce qui fait du sens ou non, mais d’écouter et de prendre en compte la valeur perçue dans les jobs par les équipes. C’est un renversement d’analyse : vous partez de vos collaborateurs comme vous partiriez de vos clients pour déterminer les services ou produits ayant le plus de valeur perçue pour eux.
Mesurer le temps passé, approximativement, permet d’une part de constater l’écart entre ce que l’on croit faire au quotidien, et ce que l’on fait vraiment.
Mais plus encore, cela permet d’identifier où les équipes mettent de la valeur ajoutée. Pas pour leur entreprise ou leur manager (ce qu’on attend de moi, le travail prescrit), mais pour elles-mêmes (le travail réel). Cet écart de valeur ajoutée peut être important entre membres d’une même équipe, mais les grandes tendances se rejoignent néanmoins.
Je vous invite à classer les activités en 3 grands blocs :
- Les activités à haute valeur ajoutée (celles qui me réalisent, que j’aime faire, dans lesquelles je suis probablement très compétent)
- Les activités à valeur ajoutée moyenne (celles qu’il faut faire, qui sont sur le chemin critique du process, sans pour autant que j’y trouve un intérêt ou désintérêt particulier)
- Les activités à très faible valeur ajoutée pour les collaborateurs (nous les appelons chez MURANO des temps récupérables).
3 – Agir :
L’intégralité de nos analyses sur le sujet nous enseignent 3 grands axiomes :
- Ce n’est pas parce qu’on travaille beaucoup (volume horaire) que l’on est malheureux ! Cela fait du bien de le conclure, histoire de couper l’herbe sous le pied des générations X qui pensent que les millenials sont tire au flanc ou peu engagés. S’ils s’accomplissent dans leur job, l’engagement et le volume horaire sont des variables qui deviennent totalement secondaire. Et nos études nous montrent en plus que ce n’est pas un sujet de génération !
- Les activités à temps récupérables sont souvent très bien identifiées par l’ensemble des collaborateurs. Le défi est bien de les mesurer pour en tirer des enseignements. Lorsque vos équipes passent 45 jours par an en réunion et 23 jours à les préparer, et qu’en plus, elles perçoivent cela comme une vraie torture, la factualisation vous oblige à agir. Quand un marketeur passe 30% de son temps à refaire les mêmes reportings ou de la traduction, il est fort probable que vous n’activiez pas la partie de son cerveau pour laquelle vous l’avez recruté. #toobad
- En tant que DG ou patron, vous n’avez aucune idée de ce que font réellement vos équipes. Ça ne manque jamais. Il y a toujours un écart important entre la perception managériale et la réalité du terrain. Dès lors comment embarquer vos équipes si vous ne savez pas vraiment ce qu’elles vivent au quotidien ?
4 – Choisir …
… c’est renoncer. Lorsque la mesure vous dit que plus de 25% des activités de votre équipes sont des temps récupérables, cela veut dire que vous pouvez/devez alléger la charge de travail de vos équipes. Soit pour leur permettre de développer de nouvelles compétences, de nouveaux business, de nouveaux produits, de nouvelles façons de faire, soit pour s’inspirer, benchmarker la concurrence, ou encore tout simplement pour un meilleur équilibre vie pro / perso.
Il y a 5 possibilités qui s’offrent à vous pour les activités à très faible valeur ajoutée :
- Renoncer : il s’agit d’arrêter une activité tout simplement. Essayez de ne pas envoyer votre reporting hebdo du vendredi pour voir qui vous le réclame vraiment, vous serez surpris !
- Diminuer : la fréquence, ou le niveau d’aboutissement d’une tâche peut être variable. Peut-être qu’un bon 12/20 peut suffire pour une première présentation interne, ou que la veille concurrentielle de votre marché peut se faire tous les 15 jours au lieu d’une maille hebdo.
- Automatiser ou processer : c’est une décision entre le coût du changement et les 2 jours par mois que votre équipe commerciale passe à remplir son CRM un peu dépassé. L’automatisation peut être légère, les process peuvent souvent être optimisés.
- Sous-traiter ou déléguer : une tache peut être affectée à une autre équipe si cela est plus logique, ou peut être confiée à un prestataire dont c’est le métier, la spécialité, et qui le fera bien mieux que vous.
- Conserver et réexpliquer : c’est le plus compliqué. Car ce n’est pas parce-que vous aurez écouté vos équipes, que vous êtes dans l’obligation de tout mettre en œuvre. Certains status quo sont nécessaires, et c’est donc le rôle du manager de proximité de mettre du sens dans ces tâches.
Cette approche permet de gagner en efficacité, en fluidité et en engagement des équipes. Couplée à une approche méthodologique pour affecter les ressources au bon endroit, sur les tâches importantes, en dimensionnant correctement vos équipes (méthode Organisation Base Zero), elle forme ce que nous appelons « Efficiency that makes sens », pour une performance collective dans laquelle les desseins individuels sont bien au service du collectif.
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